La maladroite {Alexandre Seurat}

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Les premier mots : un avis de recherche et le descriptif d’une fillette disparue.

De part sa construction, nous ouvrons là un roman original : parti d’un fait réel, l’auteur donne la parole à tout l’entourage d’une petite Diana, qu’on devine décédée. Les protagonistes vont tour à tour parler avec leur mots et leur personnalité. Ils vont raconter Diana, cette enfant discrète, peu bavarde, au comportement parfois bizarre. Chacun y va de sa vision, de son interprétation et aussi de sa volonté à vouloir comprendre ce qu’elle a. Cette Diana qui n’est pas bien née, ou pas née sous les bonnes étoiles..

Nous allons écouter la grand-mère de Diana, aimante mais sans prise sur sa propre fille. Le dialogue est rompu, comme avec le reste de la famille : la sœur, le gendre, le grand frère de Diana. Parlerons aussi les directrices d’école successives, l’infirmière, les services sociaux, les gendarmes…

Petit à petit, le sujet du roman nous saute aux yeux, la maltraitance d’enfant. C’est le calvaire de Diana qui sera raconté, en filigrane.. car rien n’est dit, rien n’est avoué.. Tout est dissimulé, caché et deviné par l’entourage proche ou moins proche. D’un crescendo qu’on voudrait encore ralentir, la vérité éclatera bien assez tôt, mais trop tard pour la fillette.

On pourrait jeter la pierre aux services sociaux, au premier médecin scolaire.. Mais à qui la faute ? Manque de communication, de moyen, de persévérance, de droits ?? Quand l’un se heurte à l’indifférence d’une hiérarchie, l’autre se mure aux mensonges des parents contenus par leurs airs parfaits. On perçoit tout de même une lenteur dans la prise de conscience et la mise en route administrative. On attend toujours que … que quoi au final ?

« La maladroite » est un roman d’un genre et à l’écriture difficiles à appréhender. La narration style reportage est très spéciale, des mots jetés sur le papier, comme ils viennent, ceux d’une famille apathique et particulière, décousue, où les liens sont rompus. Pas de tournures de phrases, pourquoi mettre en scène, enjoliver l’horreur ?

C’est un court mais intense roman, déroutant. Il donne à réfléchir sur les difficultés à déceler et arrêter la maltraitance, même lorsqu’elle paraît évidente.

Le mot final vient jeter toute l’horreur qu’un être humain peu infliger à sa descendance.. J’ai refermé le livre écœurée, impuissante, et finalement meurtrie, un cœur de maman qui saigne…

 

Editions Rouergue (La Brune)lien ◊ Août 2015 ◊ 128 pages ◊ 13,80€

 

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Les petits derniers… #10

Une catégorie dont on se passerait bien tous.. mais qui fait quand même vachement plaisir, Avouons-le ! Voici les « Petits derniers » sur l’immense pile de Félicie et de sa buissonnière désormais (autant vous dire qu’on double la cata..).

Les Petits Derniers

 

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Ma dernière ballade shopping fut assez productive.. partie chercher une tenue pour le mariage d’une amie, je suis revenue sans robette, mais avec de la lecture ! Comme l’a dit un auteur, au moins, si je m’ennuie pendant la cérémonie, j’ai de quoi lire 🙂

J’avais déjà montré la pile sur Instagram et Fbook, voici maintenant en détail les-livres-du-délit.

 

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Trente six chandelles de Marie Sabine Roger

Allongé dans son lit en costume de deuil, ce 15 février, à l’heure de son anniversaire, Mortimer Decime attend sagement la mort car, depuis son arrière-grand-père, tous les hommes de sa famille sont décédés à onze heures du matin, le jour de leurs 36 ans.
La poisse serait-elle héréditaire, comme les oreilles décollées ? Y a-t-il un gène de la scoumoune ? Un chromosome du manque de pot ?
Que faire de sa vie, quand le chemin semble tout tracé à cause d’une malédiction familiale ?
Entre la saga tragique et hilarante des Decime, quelques personnages singuliers et attendrissants, une crêperie ambulante et une fille qui pleure sur un banc, on suit Mortimer finalement résigné au pire.
Mais qui sait si le Destin et l’Amour, qui n’en sont pas à une blague près, en ont réellement terminé avec lui ?
Dans son nouveau roman, Marie-Sabine Roger fait preuve, comme toujours, de fantaisie et d’humour, et nous donne une belle leçon d’humanité.

 

» » Humour – Secret de famille – Mort – Littérature Française « «

 

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La maladroite d’Alexandre Seurat

Diana, huit ans, a disparu. Ceux qui l’ont approchée dans sa courte vie viennent prendre la parole et dire ce qui s’est noué sous leurs yeux : grand-mère, tante, demi-frère, instituteurs, directrices d’école, médecins, assistantes sociales, gendarmes, procureur… – tous impuissants à empêcher la répétition du pire. Ce choeur de voix, écrit dans une langue dégagée de tout effet de style, est d’une authenticité rare. Un premier roman d’une lecture bouleversante, interrogeant les responsabilités de chacun dans les tragédies de la maltraitance.

» » Roman chorale – Maltraitance – Témoignage – RL 2015 – Littérature Française « «

 

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Le vieil homme et la mer d’Ernest Hemingway

Le vieil homme part tout seul, sur la mer, dans sa petite barque, à la recherche d’un grand poisson. Le grand poisson mord à son hameçon.
Pendant trois jours et deux nuits le vieux luttera contre lui. A la fin, au prix des efforts incroyables, il en viendra à bout. Le vieux installe sa voile et met le cap sur la terre. Au bout d’une heure, les requins arrivent et dévorent le grand poisson. Le vieux en tue autant qu’il peut, mais quand il rentre au port il ne reste du poisson que la tête et l’arête. C’est la condition même de l’homme qui est dépeinte ici ; c’est l’histoire du courage humain, de l’énergie humaine, de l’amour des êtres ; c’est le poème de la pêche au gros poisson, c’est la victoire du cœur sur le désespoir.

Tu veux ma mort, poisson, pensa le vieux. C’est ton droit. Camarade, j’ai jamais rien vu de plus grand, ni de plus noble, ni de plus calme, ni de plus beau que toi. Allez, vas-y, tue-moi. Ça m’est égal lequel de nous deux tue l’autre.
Qu’est-ce que je te raconte ? pensa-t-il. Voilà que je déraille. Faut garder la tête froide. Garde la tête froide et endure ton mal comme un homme. Ou comme un poisson.

» » Classique – Mer – Solitude – Pêche – Littérature Américaine « «

 

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On ne présente plus Hemingway … mais je souhaite vraiment lui redonner sa chance après des années collèges laborieuses ! Les deux autres sont des éditions La brune au Rouergue avec la cerise sur la pile : j’ai tellement aimé Marie Sabine Roger avec « Les bracassées », un style pourtant très atypique, cette trouvaille tombe à pic !

 

Bon dimanche à vous les copains lecteurs ..

Les bracassées {Marie-Sabine Roger}

Les bracassées

Lorsqu’une Fleur un peu stressée rencontre une Harmonie bien énervée, cela donne un cocktail explosif et hilarant ! Pourquoi hilarant.. lisez donc la suite :

Le roman commence avec une narration à la première personne : très ordonnée, précieuse, délicate, pointilleuse, limite coincée mais en même temps, vraiment fouillis et tout peut vite partir dans des détails insignifiants faits d’apartés qui trainent en longueur, pour revenir au sujet de départ. On comprend bien que cette personne a posé une annonce pour trouver quelqu’un pour quelques heures de ménage – et sous entendu de garde de chien. Et de bien d’autres choses, mais oh diantre je me perds ça et là – qu’allez vous penser de moi ?

C’est vrai j’ai été un peu désarçonnée au début ; j’ai hésité à continuer car ce type de narration ne me convenait pas, surtout pour entendre quelqu’un parler de choses si… futiles..  Où l’auteur voulait-elle nous mener ?

Fleur, angoissée de sa vie, souffrant d’un certain embonpoint et d’agoraphobie sévère, se calme à coup de cocktail d’anxiolytiques. Elle ne sort que pour aller chez son {cher} thérapeute {adoré}. Elle consigne toute sa vie dans un journal intime, ce qui aide à canaliser ses peurs – ou pas.

Et puis chapitre suivant la Ah Ah Sale pute narration change : vive, saccadée, vulgaire aucune ponctuation aucune majuscule des mots comme ça Putain qui s’enchainent et un rythme très « rythmé » vif violent parfois trash..Culé.. ! Et voilà notre chère AhahOuhOuhAh Harmonie qui suce des queues putain vous avez deviné elle a le syndrome Gilles de Tabourette bordel Faut que je réponde à l’annonce ça va me faire du bien et occuper mes bras !

Pardon, mais c’est la faute de l’auteur 🙂

Là, j’ai enfin compris qu’il y avait deux narratrices dans ce roman !

Et finalement, les points de vue de Fleur et d’Harmonie s’alternent dans une chorale merveilleusement bien orchestrée. Quand l’une nous narre  leur rencontre de manière prudente et angoissée, l’autre nous la fait à la Tabourette. Loin de moi l’idée de me moquer, mais sincèrement, j’ai ris, j’ai ris.. en pleine nuit et dans la salle d’attente de mon dentiste.

Mais ce ne serait pas aussi drôle si il n’y avait pas d’autres cabossés dans ce roman ; Car oui, dans la Rue des Soupirs, il y a aussi les autres copains : Elvire, la copine d’Harmonie avec ses yeux qui s’excitent à la mode «essuie-glace », Tonton, une femme baraquée au langage de bucheron gracieux qui sculpte-des-sculptures-que-personne-ne-comprend et un vieux et laid photographe, Mr Poussin, qui sait capturer la vrai beauté des passants grâce à ses clichés d’instants volés ici et là. En noir et blanc, il change le regard que l’on porte sur la différence. Je vous laisse deviner le joyeux bordel lorsque la fine équipe est au complet.  

C’est avec le temps,  quelques vulgarités et les épreuves de la vie, que tout ce petit monde va apprendre à se connaitre, à cohabiter et s’entraider dans de belles aventures, afin de montrer le handicap sous d’autres aspects. L’auteure a su nous transmettre une belle histoire vraiment vivante aux multiples personnages très atypiques mais néanmoins très attachants. Ici on apprend à vivre avec ses différences, à s’accepter et à rire de soi {avant que les autres ne s’en chargent}. Ces personnes ont des symptômes qui dérangent, des physiques particuliers, des manies, des tocs.. une belle brochette de bracassées. Leur point commun c’est d’avoir un cœur gros comme ça, malgré  cette difficulté à vivre au milieu du regard des gens dits ‘normaux’, dans cette société d’exclusion où tout est pesé, millimétré, calibré.. jugé.

Je trouve que c’est un pari osé de faire parler une personne atteinte du syndrome Gilles de la Tourette sans risquer l’accusation grossière. Mais ici, tout est question de pudeur et de respect. PutainCulé.

Un gros coup de cœur ♥ pour ce roman jubilatoire et surprenant, à la narration si particulière. Le ton est toujours joyeux, jamais cliché jamais méchant. C’est un roman rempli d’espoir et d’amour qui nous montre qu’avec un autre regard, de la bienveillance et un gros de pied de nez à la société et tous ces codes qui nous enferment, nous pourrions changer beaucoup de choses.

Je ne peux que vous recommander ce roman à la couleur Bonne Humeur !

 

Lecture numérique

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La brune au Rouerge ◊ Aout 2018 ◊ 320 pages ◊ 20€ en broché ◊ 14.90€ num.

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