Cotton County {Eleanor Henderson}

Cotton county1.jpg

 

Nous sommes dans le Sud de la Géorgie, à une époque où la ségrégation raciale et la haine sont toujours d’actualité et gèrent la vie de tous les habitants. En 1930, lorsqu’un vol est commis, c’est par un noir forcément, un meurtre, un noir encore, un viol… un noir toujours..

Le décor, c’est la plantation de coton des Wilson, sur laquelle travaille la famille de métayer, les Jesup : Juke le père et Elma, qui a perdu sa mère en couche. Il y a aussi les employés de couleur des Jesup ; Ketty aide familiale et accoucheuse, sa fille Nan, et Genus le nègre des champs.

Bien que Nan et Elma aient été élevées ensemble par Ketty et se considèrent comme des sœurs, l’une n’en reste pas moins la blanche que l’autre est noire. Injustices, brimades, abus des maitres et sévices corporels liés aux croyances font légion, c’est trop souvent la petite Nan qui en subira les tristes conséquences.

Mais lorsque Elma, qui fréquente le fils d’une importante famille de la ville, accouche de jumeaux – un blanc et un noir – c’est le sort de Genus qui est injustement jeté, c’est forcément lui le violeur. Il sera donc exécuter de la manière la plus inhumaine qui soit – sans jugement bien sûr. Mais petit à petit, les gens s’interrogent sur la réelle culpabilité de Jesup. A l’aide d’alcool frelaté, de manipulations, de tricheries et d’arrangements injustes, les langues se délient et les vengeances accusent et l’histoire se révèle, petit à petit…

C’est dans ce roman très sombre posté à une époque où rien n’est laissé au hasard, que l’auteur va nous promener lentement, à la recherche des secrets et des révélations qui feront lumière sur la répugnante vérité de cette gémellité particulière. Nous remontons le fil de l’histoire, avec les émotions de chacun, jusqu’à ce moment terrible.

Les flash back s’alternent dans un même chapitre, entremêlant parfois le passé et le présent entre deux lignes ; bien que le roman tourne autour des deux jeunes filles, Nan et Elma, chaque personnage vivant autour à son fardeau, ses souvenirs et ils apportent tous une pierre à l’édifice pour révéler que ce certains cherchent à cacher.  La narration est parfois particulière, alternant elle aussi des temps passé et du futur conditionnel négatif sur de grosses parties de chapitre : « elle ne lui dira pas ce qu’elle a vu, ne viendra pas non plus le border. Il ne croira pas sur parole cette fille dont le père est soupçonné et ne couchera pas les petits contre elle.. » puis retour au passé.

Le roman s’étire sur 650 pages et toute cette construction le rend finalement assez dense et pesant. Le sujet n’étant déjà pas un sujet facile,  les actions parfois dures à supporter, le manque de dialogue, c’est une tension palpable en continu, moite et poussiéreuse.. j’ai ressenti certaines longueurs, un inconfort dans cette lecture parfois difficile.

Cotton County est tout de même un roman qui marque les esprits et où le talent de l’auteur est évident.

Je remercie Léa du superbe Picabo River Book Club ainsi que la collection Terres d’Amérique d’Albin Michel pour cette belle lecture.

 

Traduit de l’américain par Amélie Juste-Thomas

 

∴ ∴ ∴ ∴ ∴

 

Editions Albin Michel ◊ Sortie le 20/03/2019 ◊ 656 pages ◊ 23.90€ broché – 15.99€ Num.

» » Lien vers la fiche produit sur le site des Ed° Albin Michel « «

Publicité

Changer l’eau des fleurs {Valérie Perrin}

Olà du bateau !

Les chroniques se font rares ici, heureusement que j’ai programmé quelques articles « Dans ma pile..  » 🙂

Je reviens te parler aujourd’hui d’un très beau roman, reçu pour une Masse Critique privilégiée de Babelio et pour laquelle je suis méga en retard.. Je les remercie infiniment pour cette lecture et présente mes excuses pour ces jours d’attente. Merci également aux Editions Albin Michel.

 

Changer l'eau des fleurs - Perrin, Valerie

Un seul être nous manque et tout est dépeuplé.

Mes voisins de palier n’ont pas froid aux yeux. Ils n’ont pas de soucis, ne tombent pas amoureux, ne se rongent pas les ongles, ne croient pas au hasard, ne font pas de promesses, de bruit, n’ont pas de sécurité sociale, ne pleurent pas, ne cherchent pas leurs clés, leurs lunettes, la télécommande, leurs enfants, le bonheur.

Ils ne lisent pas, ne payent pas d’impôts, ne font pas de régime, n’ont pas de préférences, ne changent pas d’avis, ne font pas leur lit, ne fument pas, ne font pas de listes, ne tournent pas sept fois leur langue dans la bouche avant de parler. Ils n’ont pas de remplaçants.

Ils ne sont pas lèche-cul, ambitieux, rancuniers, coquets, mesquins, généreux, jaloux, négligés, propres, sublimes, drôles, accros, radins, souriants, malins, violents, amoureux, râleurs, hypocrites, doux, durs, mous, méchants, menteurs, voleurs, joueurs, courageux, feignants, croyants, vicelards, optimistes.

Ils sont morts.

La seule différence entre eux, c’est le bois de leur cercueil : chêne, pin ou acajou.

C’est ainsi que débute ce livre coup de coeur ; ce n’était pas franchement gagné.

La mort et moi, on n’est pas trop copine, disons que ne comprends pas ce qu’elle vient faire là, alors qu’on est bien… Quand j’ai lu le résumé, j’ai eu peur d’être dérangée et peur de m’ennuyer, comme la plupart des personnages silencieux de cette histoire. Pourtant lorsque j’ai refermé ce livre, j’avais un gout de trop peu. Bien qu’il m’aie balancé ces 550 pages en deux jours, je suis restée suspendue.. en attente.

Valérie Perrin avec sa plume si délicate, nous retrace la vie de la charmante Violette Trenet, née sous X et qui n’a jamais été adoptée. Très ou trop tôt, elle a du affronter les épreuves de la vie. D’abord gardienne de barrière, elle deviendra gardienne de cimetière : un cimetière choisi par une nouvelle et cruelle épreuve de la vie, celle qu’on ne souhaite à personne. Elle est pseudo accompagnée d’un mari plutôt antipathique et désagréable, qu’on déteste forcément. Et puis on apprend à connaitre certains de ses sentiments, ceux qu’il a enfoui lui aussi au fond et qui le rendent aussi dur, froid et distant.

Au milieu de ces joyeuses funérailles, des hommes, des femmes, des maires, des avocats, des grand-mère, des veuves.. il y a Violette, toujours debout, frêle et sensible, attachante forcément, courageuse assurément, elle accueil les nouveaux avec toujours beaucoup d’humilité, reçoit et réconforte les proches, ses collègues, entretien les dernières demeures. Par sa présence, Violette réchauffe et préserve les âmes, mais elle s’efface volontairement quitte à s’oublier un peu.

C’est la rencontre avec un proche d’un récent défunt qui va venir bouleverser son quotidien, ses habitudes et ses sentiments. Nous irons de secrets de famille en révélations apaisantes ; est-ce le début du bonheur pour Violette ?

Les chapitres courts permettent une lecture très addictives, jamais de longueur, ils défilent très vite.. Ils débutent tous sur des textes bibliques lus aux funérailles ; des passages joyeux et toujours porteur d’espoir.

Ce livre est un tourbillon d’émotions, de rencontres, de va et vient, de joie, d’amour. Beaucoup de tristesse, mais jamais trop. Ici point de mélodrames ni de clichés, juste la vie, au milieu des morts.

J’ai littéralement été embarquée dans ce roman, bien que mes émotions aient été bousculées plus d’une fois. Je n’aime toujours pas la mort mais ce qui me rassure, c’est qu’un jour, j’aurai certainement une Violette Perrin comme voisine..

Un vrai beau coup de cœur pour ce roman ♥ ♥ ♥

∴ ∴ ∴ ∴ ∴

Résumé : Violette Toussaint est garde-cimetière dans une petite ville de Bourgogne. Les gens de passage et les habitués viennent se réchauffer dans sa loge où rires et larmes se mélangent au café qu’elle leur offre. Son quotidien est rythmé par leurs confidences. Un jour, parce qu’un homme et une femme ont décidé de reposer ensemble dans son carré de terre, tout bascule. Des liens qui unissent vivants et morts sont exhumés, et certaines âmes que l’on croyait noires, se révèlent lumineuses.

Edition : Albin Michel

Nombre de pages : 560

Date de sortie : 28/02/2018

Prix : 22.50€ en broché (15€ numérique)