L’arbre des rêves {Antoine REUX}

Mercredi c’est trop permis, place à la littérature jeunesse

Lorsque j’ai vu passer la campagne Ulule pour ce roman illustré, j’ai été plus que séduite.. vous savez mon penchant pour la littérature jeunesse et mon besoin d’y trouver des choses bien faites pour remplir la tête de nos jeunes apprentis lecteurs.

Et ma joie n’a pas faibli lorsque je l’ai reçu. C’est cliché mais vraiment, il était encore plus beau que ce que j’espérais.

Je tiens à préciser que je ne suis pas du tout habituée aux albums illustrés, dans le sens, je n’en lis pas souvent : l’âge de mon ado est comment dire.. plutôt destiné aux mangas ! Donc je ne vous livrerai qu’un simple ressenti de lectrice et non pas de Bd-phile ou autre nom scientifique (vous le connaissez, vous ? )

« L’arbre des rêves » c’est l’histoire de la jeune et jolie Zoé. Elle vient de déménager à la campagne car sa maman ne supportait plus la ville, elle a changé d’école, d’amis, de maître.. bref rien ne va. Sa nouvelle vie ici est nulle ! En plus, elle fait d’horribles cauchemars depuis quelques temps et l’heure du coucher devient vraiment angoissante. Ses nuits sont faites de forêts sombres, aux arbres tordus et remplies des créatures aux yeux rouges.. desquelles Zoé n’arrive pas à se sortir.

Sauf que cette nuit là, Zoé arrive à sortir de la forêt, guidée par de superbes papillons lumineux et.. son chat adoré, Citrouille version XXL !

Les deux comparses vivront des aventures sous les étoiles ou en ballon dirigeable. Ils traverseront la mer des songes, le défilé des souvenirs et iront à la rencontre de nombreux personnages, plus ou moins gentils : Messieurs Peur et Catastrophe, les subalternes du Maître des cauchemars, Passeur le gentil héron, ou encore Léonie la grenouille géante qui travaille pour le Maître des rêves.. Tous ces personnages les conduiront vers l’Arbre des rêves, le lieux pour tous les rêveurs en quête de réponses.

Je pense que ce livre pourra plaire dès le plus jeune âge, les premiers lecteurs je veux dire : 7/8 ans facilement. Il traite subtilement de sujets importants, l’amitié et l’entraide bien sûr, celle qui lie Zoé et Citrouille est la plus tendre. Il permet aussi de poser des mots sur des petits maux de nos enfants, la période des terreurs nocturne est très souvent présente et l’histoire amène une sorte de « libération » par la parole, de pouvoir contourner ou trouver une solution douce auprès de ses proches. Que ce soient les parents, nos amis imaginaires (à cette âge, ils sont bien réels) ou même son animal domestique !

Les illustrations sont toutes plus belles les unes que les autres, ce livre est magnifique. Antoine Reux est l’auteur et l’illustrateur, on y voit son travail précis et consciencieux. Je ne suis pas du tout déçue.

Les couleurs sont harmonieuses, dans des camaïeux d’orange et de violet, des tons chauds et généreux ; les formes sont douces et les personnages très réalistes. Malgré leur statut de méchants pour certains, ils ne font pas peur et restent très abordables pour de jeunes lecteurs.

J’ai apprécié également, le lexique en fin de livre pour expliquer l’univers et la construction de l’Arbre des rêves. Lorsque l’on n’a pas l’occasion de discuter avec l’auteur en direct, c’est très agréable d’en savoir un peu plus sur la genèse et les coulisses. Enfin moi j’adore !

La campagne Ulule a remporté un vif succès : il y a eu pas mal de paliers débloqués et des contreparties en plus du livre : poster, marque pages, figurine à découper, version numérique, fond d’écran, livre audio.. Un auteur généreux et des contributeurs comblés.

Mon seul regret, qu’il faille attendre le tome 2.

Ah.. mais euh.. on me dit dans l’oreillette que votre blogueuse Félicie est tellement en retard dans ses chroniques que le tome 2 est déjà en campagne Ulule !! (En fait, je crois bien qu’elle vient de se terminer.., décidément)

Je n’aime pas forcer à la vente mais là.. je ne peux que vous le conseiller très sincèrement. Encore une merveille de l’auto-édition (financée d’accord mais tout le boulot et donc les honneurs, reviennent bien à l’auteur)

Un immense bravo à Antoine Reux pour son merveilleux travail, je lui souhaite un très grand succès ! Et pourquoi pas, qu’un éditeur sérieux se penche sur ses albums, c’est amplement mérité !

Page Facebook d’Antoine Reux

Lien de sa boutique RedBubble ICI

Lien des vidéos YT explicatives du projet

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Gabriel Paulsen Tome 1 L’illusionniste {S.T. Blake}

« Gabriel Paulsen ne s’embarrassait pas de considérations aussi triviales que la politesse, les responsabilités ou le respect. Car, voyez-vous, il valait mieux que cela : il était écrivain. »

C’est sur ces deux phrases que débute le roman.. Le ton est donné et je savais que j’allais adorer le style de l’auteure. Peut-être moins le personnage !

Gabriel, le protagoniste principal est très vite présenté comme quelqu’un réellement imbu de sa personne. Et effectivement, Gabriel Paulsen est un écrivain. Enfin, était..

Il a connu sa petite heure de gloire il y a de cela quelques années, avec son seul et unique roman, adapté au cinéma. Il a fait son beurre avec le peu d’entrées que le film à généré et a laissé le succès lui monter à la tête. Beaucoup trop.

Aujourd’hui, force est de constater qu’il s’oublie un peu dans les bars, se réveille accompagné d’une fille différente tous les quatre matins, fait vivre un enfer à son colocataire, amoncelle les factures sous forme de piles branlantes…Il n’a rien couché sur papier depuis des lustres, est habité par la mauvaise foi et continue à penser que tout le monde lui doit tout. Devant son immaturité, Delany son agent l’a lâché et les maisons d’éditions lui tournent le dos.

Désormais, ce sont ses dettes, la flemme et l’alcool qui font parler de lui. Il n’est qu’un vague souvenir dans le monde de l’édition et pas des meilleurs.

Son coloc n’en pouvant plus, Gabriel se retrouve obligé de se faire loger chez sa sœur Noani et sa compagne Stefanie, les créanciers au derrière.

Un jour qu’il se balade chez un brocanteur, l’écrivain tombe sur un vieux carnet semblant être un journal intime ayant appartenu à un châtelain de la région, fin 1800. Vraiment peu scrupuleux, ses dettes s’accumulant toujours, il décide de recopier de gros passages du journal pour en faire son futur nouveau best-seller. C’est sûr cette fois, il va revenir sur le devant de la scène !

Mais lors d’une nouvelle soirée bien arrosée dans un bar, il fera la rencontre de Francisco, Nolan et Luca, 3 ados chasseurs de fantômes, présentateurs de l’émission Aventures paranormales, très médiatisée sur le net. Les garçons, fans de Gabriel, lui proposent de venir – tous frais payés – sur le tournage de leur prochaine vidéo qui concerne le manoir de Hawtorne, situé sur une Île isolée entre le Royaume-uni et la Scandinavie.

Gabriel, un brin moqueur, très rationnel, mais surtout flairant l’opportunité et n’ayant pas d’autre plan rapide pour gagner 3 sous, s’embarque avec les 3 jeunes. Ce qui au début s’avérait une moquerie envers ces présentateurs, se transformera vite en mission périlleuse pour la petite équipe..

Le démarrage du roman est tranquille ; l’auteure plante le décor, présente les protagonistes, on rigole, on fait les foufous avec Gabriel, on se dit « MéKiléCon »…

Sauf qu’une fois débarqués du ferry, l’ambiance n’est plus à la fête : un récent meurtre d’enfant, des disparitions étranges s’invitent. Le manoir de Hawtorne est le théâtre de cruels phénomènes paranormaux. Les 4 comparses vont jouer au chat et à la souris avec la police qui enquête et se retrouver avec la mort aux trousses. Tout se rapproche dangereusement de l’écrivain et Gabriel trouve vite des similitudes entre l’ancien journal et les affreux crimes qui se passent autour de lui.

Nous sommes plongés là, sur une île perdue, dans une campagne brumeuse et froide, courants d’air et pluies, nuits cauchemardesques.. Tout est posé pour nous faire ressentir que nous ne sommes pas seuls et que les ennuis ne font que commencer. L’histoire est ultra bien ficelée et même si le paranormal est au creux de l’histoire, rien n’est hallucinant, pas de surenchère d’hémoglobine. La dose de ce qu’il faut pour ficher la trouille, gentiment. Ou bien même réveiller quelques angoisses claustrophobe, comme de se retrouver ensevelie vivante sous terre, dans un cercueil. Bravo S.T. Blake.

J’ai trouvé le tout tellement bien écrit, une pointe de cynisme et de second degré en parlant de Gabriel, de jeunesse quand il s’agissait des ados. Toujours précise et dans une plume menée intelligemment, l’auteure nous balade en créant une tension omniprésente : ce roman est un savant équilibre de suspens, de surnaturel, d’humour, de réflexion. Il n’y a pas d’horreur en soi, mais une ambiance à frissons. On accuse tout le monde, on doute même de ces 3 gamins, tant les secrets vont les rattraper eux aussi.

L’autre point fort de ce roman est bien évidement cet anti-héro de Gabriel, carrément antipathique. Un personnage très bien travaillé, pas caricaturé, bien campé dans le réel : le gros connard prétentieux. Ce personnage, ça passe ou ça casse. Je déteste pourtant ce genre d’individu dans la vraie vie mais ici, j’ai vraiment adoré cet homme. Je pense que le ton employé par l’auteur, y est pour beaucoup. Il faut dire aussi que ce petit con évolue, s’assagit, revient sur terre au fil des évènements qui lui tombent dessus. Son tempérament est mis à mal, son égo est bousculé : Gabriel est destabilisé, il en devient humain et attachant tout en restant un poil con-descendant.

Vous l’aurez compris, mon avis global est plus que positif : que dire de plus. J’ai vraiment adoré ce premier tome. S.T. Blake a su me mettre mal à l’aise et m’embarquer sur une île où se passent des choses pas très chouettes, remplies de rancunes glauques et sanglantes.

Quand on pense en avoir fini avec les vilains et confirmé des soupçons, elle nous révèle d’autres vérités qui enterrent encore un peu le mystère et certaines zones d’ombres. L’auteure est maligne. Je repique pour un tome 2 bien évidement.

Je voudrais terminer en parlant de ces détails qui font toute la différence chez moi. (et qui me mettent en joie !! )

Vous savez maintenant que je suis très sensible au travail des auto-édités ? S.T. Blake est une nouvelle preuve que l’auto-édition regorge de talents cachés et d’auteurs consciencieux.

Gabriel Paulsen c’est en fait un Package. Vous êtes enveloppés dès le début.

L’auteure est son projet : elle y met beaucoup de sa personne. Déjà, sa façon d’être venue m’aborder pour me présenter son roman et Gabriel, tout ce qu’elle initie autour de ce projet, elle est très présente sur les réseaux et a beaucoup d’interaction avec ses abonnés. À la réception du paquet, j’ai été plus qu’enchantée : enveloppe noire, emballage du livre dans un papier de soie noir avec un sticker à l’effigie du roman, une carte avec des tâches rouge sang (ce que je préfère je crois ! ), un marque page du tome 1, un petit mot de l’auteure.. Bref. S.T. Blake est impliquée et elle va au bout des choses, dans le moindre détail. Et j’adore.

Je n’aime pas parler argent mais en comparaison d’un très récent retour, ici nous avons un roman de 380 pages – écrit en petit – pour 13,90€. Dois-je en rajouter ?

Merci à S.T. Blake pour cette terrible découverte ! Et pour sa patience également..

Si j’étais vous, j’irai vite m’abonner à son Instagram, cette auteure me fait peur parfois avec ces questions bizarres et qui fichent la trouille mais .. elle est vachement drôle.

Lien du site web de l’auteure (cliques si t’es courageux..) – Parution Janvier 2021 – 380 pages – 13,90€

Lalie Tome 1 Le monde caché de Naturia {Myriam Lorenz}



Le mercredi c’est permis.. vive la littérature jeunesse.

Un soir, alors que Lalie 12 ans et sa maman sont en voiture, un terrible orage éclate. Le véhicule sort de sa route et percute un arbre de plein fouet. La jeune fille se réveille dans une forêt inconnue. Elle décide alors de s’aventurer un peu, à la recherche de quelqu’un qui pourrait l’aider à retrouver le chemin de sa maison. Par chance ou par hasard, elle fera la rencontre de Lucas. Si d’apparence, c’est un jeune garçon d’un âge identique, Lucas à l’air d’être tout de même un peu différent : en effet, il vit seul dans une petite maisonnette au milieu de la forêt, ne sait pas ce que sont des ‘parents’ et possède un animal domestique qui n’est autre qu’un youpami. Un mélange de gros hérisson croisé rat, pouvant changer de couleur tel un caméléon.. !

Forte de cette nouvelle amitié, Lalie tente tout de même de trouver un moyen de sortir de ce lieu qui semble loin de son monde afin de rentrer chez elle.

Après plusieurs jours de recherches, la « porte » reliant les deux mondes est retrouvée.

Une fois le passage effectué, Lalie se réveille à l’hôpital, quelques heures seulement après l’accident. Consciente alors qu’un autre monde existe, mais qu’il n’a apparemment pas le même espace temps, elle décide de mener sa petite enquête, en compagnie cette fois, de sa meilleure amie Éléonore et de quelques alliés surprise.

Lalie est une héroïne très joyeuse, insouciante, souvent positive malgré les évènements. Elle n’a pas l’air effrayée de rencontrer Lucas, ce garçon spécial qui lui dévoile les secrets de cette étrange vie à Naturia. Les aller-retours entre les deux mondes seront ponctués de jolis moments d’amitié mais aussi d’un peu de magie.

J’ai beaucoup aimé le bal des étoiles, que Lucas et Lalie ont partagé ; dans le ciel, un ballet nocturne d’étranges « animaux » , baigné de sons et lumières. C’était mélodieux et lumineux.. une soirée suspendue dans le temps.

Un univers fantasy très abordable écrit par une plume légère et un vocabulaire fantastique très explicite. Une petite partie de harcèlement, sur laquelle on ne s’étend pas de trop, s’apparentant surtout à un chantage qui ne dépasse pas quelques paragraphes. L’univers principal restera la gestion des deux mondes et la découverte des secrets de la forêt.

Quelques petites imperfections tout de même, des incohérences d’attitudes ou des évènements qui n’ont pas leur place à ce stade de l’histoire (ou alors pas assez exploitées) – selon moi. Ces détails passeront facilement inaperçus aux yeux de jeunes lecteurs mais pourront dénoter chez nous, adultes. Cependant, Lalie et le monde caché de Naturia est un premier tome vraiment sympa qui ravira un lectorat friand de fantaisie, à partir de 10 ans.

L’auteure nous laisse terminer le premier tome avec des révélations qui ne manqueront pas de surprendre les lecteurs.. Connaissons-nous bien les gens qui nous entourent ?

Merci à Myriam Lorenz de m’avoir fait découvrir son attachante petite héroïne, je prends le rendez-vous pour la suite sans problème.

À noter un détail qui a son importance pour moi : les décos intérieures ! Des arabesques ornent les débuts des parties 1 et 2. Soucieuse du travail qu’apportent les auto-édites à leur livre, il dénote selon moi une envie de bien faire et de coller complètement au thème fantaisie du roman. Je suis ravie !

Lien vers le blog de l’auteure – Parution Mai 2021 – 171 pages – 9,99€

Libres dans leur tête {Stéphanie CASTILLO – SOLER}

Quelque part dans une cellule, Laurent, jeune homme et fils de bonne famille purge une peine pour meurtre. Lors d’une bagarre, il tue accidentellement, le dealer qui refilait de la drogue à sa demi-sœur.

Seul depuis plusieurs mois, il sera rejoint par Romain, issu d’une famille d’accueil, qu’il voit en pointillé depuis bientôt deux ans, à cause de mauvaises fréquentations. Au milieu d’un cambriolage qui a mal tourné, la propriétaire, une dame âgée est tuée. Accusé de violation de domicile et extorsion aggravée ayant entraîné la mort, entre autre, il sera lui aussi incarcéré.

Deux jeunes, deux familles, deux éducations, mais deux incidents mortels : ils sont là pour leurs actes ou mauvaises fréquentations et ils n’ont pas le choix que de payer pour ce qu’ils ont fait, intentionnellement ou pas. Dans cette même petite cellule, les deux hommes vous devoir cohabiter. La relation entre Laurent et Romain ne sera pas facile les premières semaines. Trop de choses les sépare et surtout, il faut savoir se protéger ici. Dans un espace restreint, où le manque de propreté évidente, d’hygiène parfois mais surtout d’intimité sont le quotidien, il va falloir trouver comment avancer. Les relations peuvent êtres explosives. Pourtant, ces deux jeunes hommes ne sont pas des mauvais garçons : à force de paroles timides et de lâcher prise, une réelle affection les unira.

Stéphanie Castillo-Soler nous plonge dans le milieu carcéral : les relations inter prisonniers, les préparations au procès, les visites au parloir, les rivalités, les bagarres, la lassitude, le désespoir. Cependant, la grande différence avec un roman noir retraçant le quotidien de détenus, c’est qu’elle a posé une petite bougie sur la fenêtre.

Cette amitié naissante entre les deux garçons, leur correspondance extérieure, le travail à la bibliothèque de l’un, les dessins de l’autre.. Ces évasions sont autant de pas vers la liberté. Ces moments sont précieux et les aides à tenir, à continuer à exister, à faire des projets pour demain.

C’est en cela que l’auteure a su habilement jouer avec la part de lumière qui existe en chacun de nous. Une part d’humanité mais aussi d’amour et de résilience. Elle n’occulte pas du tout le côté sordide, mais elle le sublime d’une plume sensible. Elle offre ici un roman lumineux et plein d’espoir, qui nous porte à réfléchir sur le sens que l’on donne à sa vie mais aussi au prix de sa propre liberté.

Enfermés entre 4 murs, mais « Libres dans leur tête ». A l’image de la couverture avec ce coquelicot sorti de ce mur gris et sale. La témérité paye.

Ce roman a été lauréat d’un concours organisé par Librinova. Je renouvelle mes remerciements à Stéphanie Castillo-Soler pour sa gentillesse et sa grande patience et souhaite longue vie à son roman.

Lien de la fiche sur Librinova – Parution Août 2019 – 158 pages – 13,30€

Moi, Caroline… {Yann MALAUD}

Caroline se réveille en salle post-op : son esprit est brumeux, flou, douloureux même. Un câble de perfusion sur le bras, un énorme bandage enserre son crâne, sa mâchoire, ses épaules.

Un infirmier quelque peu dynamique vient s’enquérir de sa santé. La réponse est évasive car Caroline ne sait pas vraiment où elle est, ce qu’elle fait ici, ce qui se passe ; mais le plus irréel, c’est qu’elle ne sait même pas qui Elle est

L’infirmier lui parle comme si la vie suivait son cours. Il lui explique que son opération du cerveau est une réussite, que le greffon était de bonne qualité mais Caroline reste perdue.

Très vite, elle aura la visite d’un homme et d’une femme d’un certain âge, rassurés que l’opération se soit bien passée et enfin d’un Michel, heureux aussi qu’elle soit en vie et qu’elle rentre à la maison..

Des moments hors du temps, comme dans une bulle prête à exploser. Acquiescer, sourire, comprendre, se laisser entraîner par ces personnes pourtant bienveillantes mais qu’elle ne reconnaît pas. S’ajoute à cela une montée d’angoisse, des phrases en espagnol qu’elle énonce instantanément et la terrible sensation d’être enfermée dans un corps et des souvenirs qu’elle ne contrôle plus vraiment.

Pourquoi ne se rappelle t’elle de rien ?

Qui sont ces gens qui semblent tenir à elle ? Des parents ? Un mari ?

Foule de questions dérangent son esprit et il lui faudra attendre son retour à la maison et plusieurs évènements troublants pour qu’elle découvre une terrible conspiration dont elle est victime.. voire peut être à l’origine.

Caroline lutte pour retrouver sa vie partie dans les méandres d’une mémoire inexistante ; elle est balancée au milieu de cette famille aimante mais inconnue, d’une passion dévorante pour les chevaux, d’un ami Daniel avec qui elle aurait eu des liens forts et d’un journal intime qui retrace quelques années de son adolescence. Reprendre sa vie oui, mais où l’a t’elle laissé ? Aussi, elle se raccroche à ce rêve permanent, dans un grenier, avec un autre enfant puis une dame qui lui parle en espagnol. Ils sont peut-être une des réponses mais qui sont-ils pour elle ?

Difficile d’en dire plus sans spoiler l’immonde machination dans laquelle vous allez embarquer.

Il m’est aussi extrêmement compliqué de vous donner un avis bien défini.

C’est d’abord la couverture qui m’a énormément plu mais aussi mise sacrément mal à l’aise : cette femme entourée de noir et de bandages, les yeux cerclés eux aussi de noir, comme si elle revenait d’entre les morts.. Était-elle consciente ? Libre ? Le résumé qui annonçait des réflexions sur l’identité et la dignité humaine.. Tout cela me dérangeait autant que cela m’attisait. Ce roman aurait pu me laisser sur le carreau car il touche à des angoisses très fortes chez moi.

Les limites de la médecine et de l’éthique y sont très exploitées : l’humain est-il prêt à tout et au nom de quoi, de qui ? Mais aussi la génétique, notre rapport à la religion, à l’être, à la vie et à la mort, à l’amour… Yann Malaud nous ouvre la porte sur ce qu’est la conscience, où s’arrête t’elle ? Nul doute que l’auteur exploite un sujet qu’il aime et qu’il a réellement travaillé. Et pour cela, j’ai trouvé ce roman excellent.

Seulement voilà, je m’en veux autant qu’à lui, mais je n’ai pas été « surprise ».

J’ai trouvé que le style n’avait pas suivi, trop convenu, gentillet, à la limite du cliché sur la fin. Ce type de roman noir mérite une plume sans gant, mordante et percutante. J’ai eu l’impression que l’auteur s’était retenu, qu’il n’avait pas ‘osé’, de peur de tomber dans le gore.

Pourtant pas besoin de sang et de boyaux ici, la thématique fait largement son job de nous glacer l’esprit.

Vous l’aurez compris « Moi, Caroline… » est passé à deux doigts du roman parfait, : il est vraiment prometteur mais reste perfectible à mon sens. Autant j’ai adoré le sujet, autant le style et le ton m’ont fait lever les yeux.

Après un échange téléphonique très enrichissant, j’ai la certitude que Yann Malaud a encore beaucoup à dire et qu’il a l’étoffe d’un grand. Reste à savoir si le courage et l’envie sont là, « Moi, Caroline… » mérite amplement sa place parmi les très bons thrillers psy.

Un grand merci à l’auteur pour cette lecture mais aussi pour ce moment passé à discuter.

Lien pour vous procurer le roman ou pour contacter Yann Malaud, c’est ICI.